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Photo du rédacteurECRAN DROIT

Human, dog and weirdness in cinema (Part. 1)

Dernière mise à jour : 23 nov. 2022

Pour ouvrir ce premier thème cinéma de l’année (étudiante), l’équipe de la critique vous propose de vous pencher sur le rapport des Hommes avec leurs amis les chiens. Pourquoi ce thème ? Il y a toujours un rapport très fort entre l’Homme et son fidèle compagnon, que ce soit dans la littérature, les arts graphiques ou encore dans le cinéma. On ne s’intéresse pas ici à la vision des contemporains dans des films consacrés à la famille (pour ne pas être réducteur) avec Lassie ou encore Beethoven. On s'intéresse ici à la complexité de la relation des hommes avec leurs animaux, comment un être sans véritable mystère continue d’occuper une place très importante dans nos et nos salles de cinéma.

L’idée est donc ici de se consacrer essentiellement à un relationnel vraiment particulier du chien au cinéma. C’est pourquoi sans plus attendre voici la liste des œuvres que nous avons sélectionnées. Le thème s’ouvre avec l’amour chien, s’inscrivant dans un amour inconditionnel mais pour le moins violent et moralisateur tel qu’ « Amores Perros » de Alejandro Gonzales Iñàrritu en témoigne. Puis la fidélité du compagnon canin transposé aux êtres humains avec « Ghost Dog » de Jim Jarmusch. La troisième œuvre sera consacrée à l’inverse de la précédente à l’anthropomorphisme pur et dur des comportements humains sur les chiens avec « L’île aux chiens » de Wes Anderson. Enfin pour conclure ce thème c’est la folie meurtrière s’abattant sur nos amis les chiens qui nous amènera à parler de « Under the Silver Lake » de David Robert Mitchell.


Ces œuvres cinématographiques n’ont de prime abord, que peu de rapports les unes avec les autres, cependant certains codes sont communs aux réalisations et aux écritures. Certaines idées sont récurrentes, d’autres s’opposent et s’affrontent. C’est là tout l’intérêt de la recherche que nous effectuons ; c’est l’idée de mettre en exergue différents points de vues des contemporains qui observent notre monde, se ressemblent ou s’affrontent selon les univers singuliers qui les animent.


Interlude musical - L’amour et la violence - Sébastien Tellier.

Installez vous bien, voici « Amores Perros » de Alejandro Gonzàles Iñàrritu.

Ce film est connu comme étant le premier (grand) film d’Alejandro Gonzàles Iñàrritu. Le scénario de Guillermo Arriaga a cherché à relater les mœurs mexicaines en opposant précarité et richesse, au travers du rapport entre les citadins et leur animaux de compagnie, en particulier les chiens. On suit donc les histoires, les coups durs, les complications dans la vie des Hommes, avec et parfois à cause de leurs chiens. D’où le titre « Amores Perros », en français Amours Chiennes. Ce titre est pour le moins évocateur. Traduit en français, même si ce n’est pas une expression que l’on emploie littéralement, elle reste pour autant évocatrice et on la comprend très bien. C’est « l’amour vache », mais en espagnol l’expression s’emploie avec le chien et non la vache. L’idée reste la même, bien que plus bestiale et sans doute plus violente.


Le film commence par une course poursuite en voitures entre rivaux. La caméra est placée du côté d’Octavio (poursuivi) qui tente de sauver son chien blessé par balle (par les poursuivants sans doute). La course poursuite aboutit à un exceptionnel accident de voitures. L’intrigue commence donc par le dénouement qui, une fois présenté, nous replonge au point de départ de l’histoire qui engendra cet accident. Ce mécanisme bien que connu reste pour le moins impressionnant et édifiant lorsque l’on comprend l’envergure des conséquences qu’il porte.

Ce mécanisme, en 2000 lorsque le film paraît, est déjà bien connu, Tarantino en est déjà adepte, l’explosif « Usual Suspect » de Brian Singer l’a presque sublimé et c’est au tour d’Iñàrritu de se l’approprier. Et sans mentir ça reste toujours aussi efficace. Mais pourquoi ? Parce que ça crée une mise en haleine et une attente de la part du spectateur. L’idée est simple, proposer à ce dernier d’imaginer, par lui-même, les scénarios ayant aboutit à cette situation, afin de créer l’envie de connaître la suite, ou plutôt l’avant.


Aussitôt on retrouve Octavio accompagné de son chien Cofi qui vit chez sa mère avec son frère, la femme de ce dernier ainsi que leur jeune enfant. Le nom de ce chien est évocateur pour moi, simple coïncidence ou alors pure extrapolation de ma part je ne sais pas. Cela me rappelle néanmoins son homonyme John Coffey, le colosse affectueux du couloir de la mort dans « La Ligne Verte » de la série de romans de Stephen King. Ce qui à mes yeux annonce la couleur…

Quoiqu’il en soit Octavio est amoureux de la femme de son frère et se présente comme étant bien plus méritant vis-à-vis de l’amour que Susana a à donner. Il se met donc en tête de gagner beaucoup d’argent pour fuir avec elle. Il s’avère que Cofi est naturellement doué pour les combats de chiens (clandestins) et va devenir un gagne-pain facile pour Octavio, avec le danger que cela représente pour le chien sans que son maître ne s’inquiète pour la vie de son chien.


Concomitamment on suit deux autres histoires que l’on soupçonne d’être en lien avec celle d’Octavio, et sans grande surprise le splendide accident de voiture est le point névralgique entre toutes. Donc cette œuvre est décomposée en 3 chapitres, chacun concernant un groupe de protagonistes qui seront mêlés les uns aux autres par cet accident.


Ce qui est extrêmement plaisant dans ce film c’est qu’Iñàrritu s’attaque à des thèmes très récurrents au cinéma mais sans pour autant axer l’entièreté de sa pellicule sur un seul d’entre eux. Le premier mythe évident que l’on retrouve est celui d’Icare, celui qui volait trop près du soleil et vit ses ailes de cire fondre, l’entraînant dans une chute mortelle. À Icare, il reproche de ne pas s'intéresser aux conséquences de ces actes et montre une perversion de la précarité qui pousse l’homme peu consciencieux à placer ses espoirs de richesses sur la vie d’un chien qui n’a évidemment rien demandé, tout en méprisant le sort de ce dernier.

On retrouve également le mythe de Narcisse qui, ne sachant pas nager, se noie à force de regarder son reflet dans l’eau (mais tout cela s'apprécie à l’image).


En fin de compte il y a quelque chose d’assez insidieux dans le propos de d’Iñàrritu qui est très proche de la religion, du mythe, volonté de sa part ou simple conséquence d’un environnement mexicain très pieu ? On ne sait pas vraiment. Chacun des personnages présentés à l’écran s’écartera de la morale pour se retrouver puni d’une manière ou d’une autre.


Ce à quoi on s’intéresse par conséquent c’est la forme que ces punitions vont prendre.


Il est important de rappeler que pour beaucoup de téléspectateurs, les animaux de compagnie occupent une place extrêmement importante dans le cœur de leur maîtres et maîtresses. En France, 1/3 des foyers possède un chien, par exemple. L’amour qu’on porte à un chien et que l’on reçoit de lui est assez inconditionnel. Iñàrritu s'est servi de ce lien comme un moyen d’atteindre l’Homme quel que soit le côté de l’écran duquel il se trouve.


*** Alerte SPOILER ***


Pour en revenir à l’histoire, l’accident vient déclencher la punition de chacun des protagonistes : Icare voit son chien blessé par balle, son meilleur ami mourir et l’amour de sa vie perdu. Narcisse voit sa carrière ruinée, son chien disparaître, avant de tomber dans la folie et d’être amputé. La punition du repenti est toutefois différente. Ce dernier vivait déjà reclu et se trouve dépourvu des seuls compagnons canins qu’il lui restait. Mais sa situation devient cartésienne puisque ce traumatisme lui permet de retrouver un semblant d’humanité au travers de sa fille qu’il tente de connaître après 30 ans d’absence. Les Canidés ou les Hommes ?


*** Fin SPOILER ***

Les destins sont proches des mythes, les conséquences sont différentes mais pour autant extraordinaires. Et c’est au travers de la relation entre l’Homme et le chien qu’elles se perpétuent. Le concept est simple et fait appel à la sympathie. Le spectateur est atteint par la souffrance des Hommes autant que celle des animaux, victimes directes des dérives humaines. Les chiens sont faits pour accompagner les Hommes dans leurs choix, leur bonheur, leur souffrance et par-dessus tout leur bêtise.


Voilà ce qui ressort de ce premier long métrage signé Iñàrritu. La relation des Hommes avec leurs chiens est belle mais dangereuse. Nombreuses sont les déformations comportementales que l’on peut projeter sur nos animaux.

S’il y a une morale à retenir de cette histoire, c’est que projeter nos défauts et nos exactions sur nos animaux est un jeu pernicieux. L’amour qu’on leur porte décuple les conséquences physiques comme morales. Cet amour c’est l’amour vache, c’est l’Amores Perros.

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