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Photo du rédacteurECRAN DROIT

Kinuyo Tanaka : cinéaste de premier ordre


Lors de la 12ème édition du festival Lumière, les réalisatrices des quatre coins du monde ont été mises à l’honneur.


Récompensant les réalisatrices les plus contemporaines telles que Jane Campion ou Gessica Généus, le projet de rétrospective sur Kinuyo Tanaka a vu le jour grâce Lili Histin (directrice artistique du festival) et Carlotta Films.


Kinuyo Tanaka a consacré sa vie au cinéma à partir du moment où le Japon autorisa les femmes a exercer le métier d’actrice en 1923. Alors âgée de 14 ans, elle commence à jouer et ne s’arrête plus. Elle apparait dans presque 7 films par an et sera dirigée par les plus grands de son époque tels que Hôtei Nomura et Kiyohiko Ushihara ( fervent élève de Chaplin).


D’abord vedette du muet puis du parlant elle incarne toutes les facettes des femmes de son époque : entre figure traditionnelle ( Dame et voisine en 1931) et jeune femme moderne, émancipée ( Femmes et voyous 1933), son succès se fait cependant à travers les mélodrames amoureux dont elle est l’héroïne. Tous produits par la Shôchiku, Kinuyo Tanaka est accompagnée des incontournables réalisateurs japonais de l’époque dans ces films qui feront d’elle la vedette du Japon. En passant par Heinosuke Gosho auteur du premier film parlant japonais puis Keisuke Kinoshita réalisateur des films de propagandes pendant la guerre Sino-Japonaise, Kinuyo Tanaka change de registre et brille à l’international dans les années 40 grâce à son duo avec Kenji Mizoguchi.


Ce premier tournant dans sa carrière l’envoie aux États-Unis où elle rencontre Joan Crawford, John Wayne ou encore Ronald Reagan. Ce séjour mal perçu par la presse japonaise ne l’empêche pas de continuer sa carrière et de se voit décerner l’Ours d’argent de la meilleure interprétation à la Berlinale en 1975 pour son rôle dans Bordel n°8 à Sandakan de Kei Kumai.



Le deuxième tournant majeur de sa carrière fut celui de la réalisation. Une femme parmi les hommes, car la réalisation à cette époque est un métier d’homme. Malgré sa grande notoriété, sa volonté de diriger un film apparait comme une lubie voir même une folie comme le souligne Pascal-Alex Vincent dans son ouvrage consacré à la réalisatrice.


Les attaques à son égard ne cessent pas et ont pour fondement que Kinuyo Tanaka ne sait que peu lire et ne possède aucun diplôme scolaire. Des réalisateurs qui l’ont pourtant considéré comme leur muse se retournent contre elle et ne l’acceptent pas comme leur égal. Kenji Mizoguchi ira même jusqu’à dire que « Tanaka n’a pas suffisamment de cervelle pour être réalisatrice ». Heinosuke Gosho estime quant à lui « que sa vraie voie se trouve dans l’interprétation ». Ces réactions ne sont que la triste traduction des mœurs de l’époque où ayant pourtant fait ses preuves en tant génie du cinéma, Kinuyo Tanaka devra redescendre en bas de l’échelle pour devenir plus tard la réalisatrice de l’âge d’or du cinéma japonais. Le seul à l’accepter derrière la caméra est Mikio Naruse, elle devient donc sa stagiaire tout le long du tournage de Frère et Sœur en 1953. Naruse lui rend hommage à la suite du film en lui accordant la légitimité publique dont elle avait besoin pour commencer seule.


La nouvelle société de production ShinToho se voulant innovante, engage Tanaka pour réaliser l’adaptation du roman Lettre d’amour. Ce film marque le début de la carrière de Kinuyo Tanaka en 1953 en tant que réalisatrice ainsi que la première fois où un long-métrage est dirigé par une femme au Japon.


« Si j’ai souhaité devenir réalisatrice c’est parce que je voulais, depuis longtemps que des femmes soient filmées par une femme, d’un point de vue qu’un homme ne comprendrait pas. »


Elle réalisera six films où elle étudie la place de la femme dans la société à travers la maternité (Maternité éternelle, considéré comme son film le plus personnel en 1955), l’émancipation, la prostitution (La nuit des femmes, 1961) et la réinsertion sociale.


Peu connue en France, ses films seront diffusés pour la première fois au cinéma le 13 avril 2022. Une occasion de (re)découvrir et de rendre hommage à une femme résolument moderne, déterminée et douée.


PAR CAPUCINE SIMON

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