par MATHIS GUILLOT
BLACK MIRROR : BANDERSNATCH (2018) de DAVID SLADE sur NETFLIX
Média récent souvent boudé ou incompris, le jeu vidéo ne fait plus aujourd’hui débat quant à sa valeur culturelle, artistique et économique. Au-delà des séquences de pur cinéma que sont les cinématiques, le jeu vidéo respecte dans son essence même, dans ses séquences jouables, des codes propres à l’audiovisuel : scénarios, décors, réalisation, acteurs, dialogues, musiques, photographie, et j’en passe… Seule l’interactivité individualise ce support de tout autre forme d’expression.
Cette même interactivité qui a longtemps alimenté le débat quant à la nature de l’œuvre vidéoludique et qui vient pourtant aujourd’hui faire le lien entre deux univers aux inspirations réciproques. Avec l’essor des jeux qualifiés de films interactifs que sont les productions de Quantic Dream, Telltale Games, Supermassive Games, ou Dontnod Entertainment, consacrant son gameplay sur la notion de choix influençant le déroulé des évènements, les producteurs du 7e art commencent à y voir une opportunité de proposer un format inédit et vendeur : un film dont vous êtes le héros.
Si cela n’a rien de révolutionnaire pour un joueur ou un lecteur habitué à ce genre d’ouvrage, pour un spectateur, il en va autrement. C’est ainsi que Netflix proposait l’épisode de Black Mirror : Bandersnatch il y a deux ans, communiquant sur la possibilité de vivre une expérience individualisée. D’autres projets de la sorte ont vu le jour depuis comme « Erica », avec toujours la volonté d’effacer la frontière entre les deux médias.
L’on peut dès lors spéculer sur les avancées que pourraient permettre un tel concept surtout à l’ère de la réalité virtuelle. Les cinémas allant de plus en plus vers une gadgétisation de leurs salles pour attirer le public, il ne serait pas étonnant que dans un futur proche chaque spectateur puisse s’offrir une séance immersive, individuelle mais personnalisée allant à contrecourant de ce que représente le Cinéma jusqu’alors. Le spectateur par son rôle participatif limiterait évidemment considérablement la vision d’un auteur de sorte qu’il apparait dangereux et inutile d’envisager ce format comme la future norme. On retiendra juste que le film interactif, sous-genre du jeu vidéo, pourrait un jour être reconnu comme un sous-genre du cinéma.
MATHIS GUILLOT
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